Le recours en oppression : redresser une situation inéquitable entre les actionnaires majoritaires et minoritaires d’une société par actions

Lorsque les actionnaires majoritaires prennent une décision qui constitue un abus de pouvoir, une injustice, une iniquité ou une omission préjudiciable, les actionnaires minoritaires peuvent faire valoir leurs droits afin d’obtenir un redressement.

Découvrez ce qu’est le recours en oppression

Le recours dit en oppression est en réalité le recours en redressement en cas d’abus de pouvoir ou d’iniquité. Toutefois, ce recours est communément appelé recours en oppression. Le recours en oppression constitue un outil majeur de protection des intérêts des actionnaires minoritaires et d’autres types de plaignants cherchant à faire valoir leurs droits et intérêts au sein de sociétés par actions.

Ce recours a comme fondement légal l’article 241 de la Loi canadienne sur les sociétés par actions et les articles 450 et suivants de la Loi sur les sociétés par actions du Québec.

Le recours en oppression : spécificités et exemples

Les actionnaires, les administrateurs et les dirigeants peuvent, entre autres, soumettre le recours

Au niveau de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, les détenteurs de valeurs mobilières sont les actionnaires, les créanciers, les administrateurs ou dirigeants peuvent soumettre un recours en oppression.

Au niveau de la loi sur les sociétés par actions du Québec, les mêmes protagonistes à l’exception des créanciers peuvent utiliser le recours en oppression.

Le juge peut redresser de façon très efficace une situation d’injustice

Les tribunaux disposent de larges pouvoirs pour redresser les situations d’abus, ce qui fait du recours en oppression, s’il est accueilli, un recours efficace.

À titre d’exemple, les tribunaux peuvent :

  • empêcher le comportement contesté;
  • nommer un séquestre ou un séquestre-gérant;
  • réglementer les affaires internes de la société en modifiant les statuts ou les règlements administratifs ou en établissant ou en modifiant une convention unanime des actionnaires;
  • enjoindre à la société, sous réserve du paragraphe (6), ou à toute autre personne, d’acheter des valeurs mobilières d’un détenteur;
  • modifier les clauses d’une opération ou d’un contrat auxquels la société est partie ou de les résilier, avec indemnisation de la société ou des autres parties;
  • indemniser les personnes qui ont subi un préjudice;
  • prononcer la liquidation et la dissolution de la société.

Démontrer que vous aviez des attentes raisonnables et faire la preuve de l’abus afin d’obtenir gain de cause

Le test du recours en oppression a été élaboré par la Cour suprême dans l’arrêt BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976.

Découvrez le test du recours en oppression

Pour avoir gain de cause lors d’un recours en redressement pour abus, un actionnaire minoritaire qui s’estime lésé devra convaincre le tribunal de deux choses.

D’abord, il devra démontrer qu’il avait des attentes raisonnables qui ne sont pas respectées par le comportement reproché à la société.

Les facteurs pouvant être pris en considération pour démontrer la raisonnabilité des attentes du demandeur sont, notamment :

  • les pratiques commerciales courantes de la société;
  • la nature de la société;
  • les rapports ayant existé entre les parties;
  • les pratiques antérieures de la société;
  • les mesures préventives qui auraient pu être prises, ainsi que les déclarations faites par les parties et les conventions intervenues entre elles.

Ces deux derniers facteurs revêtent souvent une importance déterminante, puisque les déclarations et les conventions sont considérées comme l’expression des attentes raisonnables des parties. En effet, les conventions signées par les parties font, la plupart du temps, office de la meilleure preuve de leurs attentes raisonnables.

Ensuite, le demandeur devra faire la preuve que c’est par un abus, un acte injustement préjudiciable à son égard ou une omission injuste de tenir compte de ses intérêts que ses attentes raisonnables ont été violées par la société.

Le recours en oppression peut être cumulé avec des demandes en injonction ou des ordonnances de sauvegarde

Le recours en oppression est souvent cumulé avec des demandes en injonction (provisoire et interlocutoire) ou d’ordonnances de sauvegarde.

Or, comme la Loi canadienne sur les sociétés par actions et la Loi sur les sociétés par actions du Québec sont muettes sur ces questions, il faut se tourner vers le code de procédure civile et la jurisprudence.

L’arrêt de la Cour d’appel St-Germain, rendu en 2011, confirme que, pour obtenir une ordonnance de sauvegarde sous le régime du recours pour oppression, il est nécessaire de respecter les quatre critères communs à l’injonction interlocutoire provisoire et à l’ordonnance de sauvegarde, soit :

  • l’apparence de droit;
  • l’existence d’un préjudice sérieux et irréparable;
  • la balance des inconvénients;
  • l’urgence.