Une mesure procédurale qui assure un éventuel remboursement de la créance
La saisie avant jugement est une mesure procédurale particulière qui est de nature conservatoire. Elle est pratiquée par le demandeur, en début ou en cours d’instance, dans le but de mettre les biens de son débiteur sous le contrôle de la justice et d’assurer éventuellement le remboursement de sa créance si le jugement final lui est favorable.
Pour vulgariser, la saisie avant jugement permet au demandeur, sous condition et avec l’autorisation du tribunal, de faire saisir par un huissier les biens de son débiteur afin de s’assurer que le jugement final à intervenir, s’il est favorable, rende l’exécution de celui-ci effective.
Empêcher les créanciers d’organiser leur insolvabilité
En effet, dans de nombreux cas, les débiteurs, en raison de la longueur voir de la lenteur du système judiciaire, arrivent à organiser leur insolvabilité rendant dès lors purement illusoire la possibilité d’exécution du jugement du demandeur. Celui-ci se retrouve alors en plus de sa créance impayée avec la frustration d’un système judiciaire inefficace et des honoraires d’avocat à ses frais.
Le recouvrement de la créance est-il mis en péril ?
Pour demander et obtenir une saisie avant jugement, le demandeur doit convaincre le juge que les biens du défendeur doivent être saisis avant jugement s’il est à craindre que sans cette mesure le recouvrement de sa créance ne soit mis en péril (art 518 Code procédure civile Québec).
Le critère est donc la mise en péril du recouvrement de la créance du demandeur. C’est pour cette raison que les biens du débiteur doivent être saisis avant le jugement.
Quand pratiquer la saisie avant jugement ?
La saisie avant jugement peut être pratiquée avant l’introduction de l’instance ou en cours d’instance.
De manière générale, la saisie avant jugement intervient avant l’introduction de l’instance ex parte. Cela signifie que la demande est présentée au tribunal en l’absence de la partie adverse qui n’a pas produit de contestation ou qui ne s’est pas présentée à l’audience. Lorsqu’une saisie avant jugement est effectuée avant la signification de la demande introductive d’instance, le demandeur produit celle-ci au greffe et la signifie au défendeur dans les cinq jours de la signification de l’avis d’exécution.
L’implication d’un huissier pour rédiger l’avis d’exécution
La saisie avant jugement se fait au moyen d’un avis d’exécution sur les bases des instructions du demandeur. Cela implique l’intervention d’un huissier qui va rédiger l’avis d’exécution.
Les biens saisis sont confiés à la garde d’un tiers, à moins que le demandeur n’autorise l’huissier à les laisser sous la garde du saisi.
Saisie sans l’autorisation du tribunal
Certains biens font l’objet d’une saisie avant jugement de plein droit c’est-à-dire sans l’autorisation du tribunal. Il s’agit :
- du bien meuble que le demandeur est en droit de revendiquer ;
- du bien meuble sur le prix duquel le demandeur est fondé à être colloqué par préférence et dont on use de manière à mettre en péril la réalisation de sa créance prioritaire ;
- du bien meuble qu’une disposition de la loi permet au demandeur de faire saisir pour assurer l’exercice de ses droits sur celui-ci.
Le débiteur peut demander l’annulation de la saisie
Le débiteur dont les biens sont saisis dans le cadre d’une saisie avant jugement n’a pas eu l’occasion de se défendre, car la procédure a eu lieu en son absence. Il peut, dans un délai de cinq jours de la signification de l’avis d’exécution, demander l’annulation de la saisie en raison de l’insuffisance ou de la fausseté des allégations de la déclaration du demandeur.
Le critère ici est donc de démontrer que les allégations contenues dans la déclaration sous serment du demandeur sont insuffisantes ou fausses.
Si le débiteur y parvient, le tribunal annulera la saisie. À défaut, celle-ci sera maintenue voir révisée ou étendue.
Une procédure d’exception efficace avant même l’introduction du recours
La saisie avant jugement est une procédure d’exception efficace qui permet la saisie des biens du débiteur avant même l’introduction du recours. Toutefois, le critère pour l’obtenir doit être correctement démontré et documenté (bonne présentation de la preuve) pour obtenir l’autorisation du tribunal. C’est une procédure complexe qui se joue en un coup. Elle est accordée ou refusée et bien souvent l’efficacité et la pertinence du recours repose dans son accueil.